Culte du 26 novembre 2023

Méditation par le pasteur Gilles VIDAL

 

 

2 Sam 7, 1-17 / Psaume 132 / Jean 2,18-21 

 

 

 

Avertissement : cette prédication est fondée sur un article de Jan Rückl : « Une dynastie en
crise : la promesse dynastique en 2 Samuel 7 comme réaction à l’exil », Trans 42 (2012), p. 80-97 ainsi
qu’un cours d’Ancien Testament donné au Centre de formation théologique et pastorale Béthanie,
Lifou, Nouvelle-Calédonie en 2004 et 2006.

« Est-ce toi qui me bâtiras une maison pour que je m’y installe ? » (2 Sam 7,5b)

F. & S. à première vue, les thèmes du temple et de la dynastie apparaissent dans des
sections distinctes de 2 S 7. L’introduction (vv. 1-3) et la première partie de l’oracle de Nathan
(vv. 4-7) concernent le temple, alors que la deuxième partie de la prophétie (vv. 8-16) est
entièrement consacrée au thème de la dynastie, à part le demi-verset 13b.
De plus, le motif du temple n’apparaît nulle part dans la prière de David aux vv. 18-29.
Cette situation a mené plusieurs chercheurs à penser que la prophétie de Nathan, telle que
nous l’avons aujourd’hui, combine deux oracles à l’origine indépendants – l’un rejetant le plan
de David de construire un temple et l’autre lui promettant une dynastie.
Cela semble aussi être confirmé par le fait que la deuxième partie de l’oracle est à
nouveau introduite par une formule des messagers (v. 8) : «maintenant… ainsi parle le
Seigneur », comme si celle-ci marquait le début d’une nouvelle parole prophétique.
Toutefois, plusieurs chercheurs ont remarqué que les thèmes du temple et de la
royauté apparaissent souvent ensemble dans d’autres textes du Proche-Orient ancien,
notamment dans les inscriptions que les rois mésopotamiens ont fait rédiger à l’occasion de la
construction ou restauration des temples. L’idéologie royale contenue dans ces inscriptions
établit une relation quasiment « naturelle » entre le temple et la royauté. L’entretien des
temples est une des tâches principales du roi en tant que représentant des hommes devant
les dieux, et en récompense, les dieux qui siègent dans les temples bénissent le pouvoir du roi.
La construction du temple atteste ainsi du droit du roi à exercer le pouvoir. Les nombreux
parallèles entre 2 Samuel 7 et les inscriptions mésopotamiennes mentionnées ont été
largement étudiés.
Le lien étroit entre le temple et la royauté est bien attesté également dans plusieurs
psaumes de la Bible hébraïque, parcourons-en quelques-uns :
Selon le Ps 2,6, Le Seigneur a sacré son roi sur Sion qui est sa « montagne sainte ».
Dans le Ps 110,2, il étend de Sion le sceptre de la puissance du roi, et au v. 4 le roi est
désigné comme prêtre à la manière de Melkisédeq.
Dans le Ps 78,68-72, l’élection de David, « tiré de sa bergerie » est accompagnée par la
construction du sanctuaire sur Sion par le Seigneur lui-même,
Et le Ps 122,1-5 donne à entendre que « le temple du Seigneur et le trône de la maison
de David constituent un ensemble » :
Quelle joie, quand on m’a dit :« Nous allons à la maison du Seigneur ! »
Nos pas s’arrêtent enfin à tes portes, Jérusalem !
Jérusalem, tu es bâtie comme une ville qui forme un ensemble uni.
(…)
Chez toi se trouve le trône du descendant de David, où il siège pour rendre la justice.
On constate donc bien qu’il y a toujours dans ces psaumes un lien entre la
construction du Temple et l’établissement du roi, l’alliance du trône et de l’autel en quelque
sorte.
Et d’après les textes de la Bible hébraïque, les rois davidiques – i.e. David et ses
descendants – sont responsables de l’acquisition du terrain pour le temple (David – 2 S 24), sa
construction (Salomon 1 R 5,16-7,51) et ses réparations et reconstructions (Akhaz – 2 R 16,10-
18 ; Ezékias – 18,4.16 ; Josias – 23) à l’époque qui précède l’exil à Babylone.
Les auteurs des livres des Rois avaient apparemment accès aux rapports de donations
royales en faveur du temple (Abiyam et Asa – 1 R15,15 ; Josaphat, Yoram, Akhazias, Joas – 2 R
12,19)13. Dans cet ordre d’idées, il faut noter les rapports de réparations du temple sous Joas
(2 R 12,5-17) et Josias (22,3-7) qui, bien qu’elles se déroulent selon les ordres des rois, ne sont
pas financées par la caisse royale mais par les dons des laïques. Ce sont justement des notices
apparaissant dans ces textes, selon lesquelles on ne tenait pas des comptes de l’argent
provenant des laïques (12,16 ; 22,7) et on n’utilisait pas cet argent pour la fabrication de la
vaisselle du temple, qui montrent que « la Couronne veillait de manière conséquente à passer
pour le donateur unique ». Financer le temple est une question de prestige pour le roi, cela
doit se voir et se savoir !
Après la destruction du temple et l’exil à Babylone (587), parmi les éléments repris de
l’idéologie royale davidique d’avant l’exil et utilisés par les livres d’Aggée et de Zacharie pour
légitimer le pouvoir de Zorobabel, nous trouvons aussi la construction du temple par le
souverain.
Pendant la période où le second temple a existé (édit de Darius en 515, voir Esd.6,15,
jusqu’à sa destruction en 70 ap. JC) ses reconstructions et réparations ont, aussi été financées
par des donateurs non-royaux.
Et notons encore que, encore sous Hérode le Grand, la relation étroite entre le temple
de Jérusalem et le roi au pouvoir est manifestée par le fait que l’achèvement de la
reconstruction du temple est célébrée le jour de l’anniversaire de l’accession du roi au trône.
Le Ps 132
La relation étroite entre le temple et la royauté est particulièrement frappante dans
le Psaume 132 sur lequel que je voudrais m’arrêter un peu maintenant.
Ce texte, du moins sous sa forme finale montre bien la structure de la relation entre le
temple et la royauté dans l’idéologie royale biblique et nous intéresse parce qu’il est sans
doute plus ancien que le texte de 2 Sam 7.
Le psalmiste prie pour que Yhwh se rappelle en faveur de David de « toute la peine »
qu’il s’est donné à la recherche d’une « place » et des « demeures » (v. 5) pour le Seigneur
Yhwh (et son arche – cf. v. 8).
Le psaume souligne ainsi de manière très forte le caractère méritoire des actions de
David. Dans les religions du Proche-Orient ancien, y compris le judaïsme, la fonction de ce type
de vœux par lesquels on s’engage à renoncer volontairement à une chose qui normalement
est permise est très souvent une supplication, et c’est clairement aussi le cas dans le Ps 132.
Le Ps 132,1 doit être compris comme une prière au Seigneur pour qu’il se rappelle « en
faveur de David » de toute son abnégation (v. 1), et qu’il la récompense de manière adéquate.
On trouve le même sens au v. 10 où « pour l’amour de ton serviteur David » correspond à
l’expression « et toute sa peine » du 1er verset, à la différence qu’au v. 10, il est déjà clair que
la bénédiction méritée par David et dont Yhwh devrait se rappeler concerne la descendance
royale.
David a rempli son vœu – il a trouvé l’arche du Seigneur (v. 6), et il a maintenant ses
« demeures » et son (lieu de) repos (vv. 7-8). En réponse, le Seigneur a juré à David la « vérité »,
et lui aussi, il remplira son serment, dont le contenu est une promesse dynastique (vv. 11-12).
La permanence de la dynastie est donc clairement promise à David dans le Ps 132 en
récompense de ses mérites liés au sanctuaire du Seigneur. D’après les vv. 12-14 :
« C’est un de tes fils que je mettrai sur ton trône.
Si tes fils respectent mon alliance
et les instructions que je leur donne,
alors leurs fils aussi siègeront sur ton trône
et ce sera ainsi pour toujours ! »
En effet le Seigneur a choisi Sion,
il a désiré y faire sa résidence.
Il a déclaré : « Voilà pour toujours le lieu de mon repos ;
c’est ici que je désire habiter !
Le règne de la dynastie davidique est d’un certain côté conditionné par l’obéissance
au Seigneur, mais d’un autre côté, il est aussi garanti par le séjour du Seigneur à Sion, la
montagne sainte, dans une sorte de donnant-donnant. Les fils de David – dont Salomon –
siègeront à perpétuité sur son trône (v. 12) parce que le Seigneur Yhwh a choisi Sion comme
son siège.
Nous pouvons donc résumer en disant que dans la perspective du Psaume 132, la
promesse dynastique a été donnée à David en récompense de ses mérites liés au sanctuaire
de Sion, et en même temps, la présence du Seigneur à Sion garantit la continuation de la
dynastie.

Mais il y a un « hic » si j’ose dire !
Le texte de 2 Sam 7 que nous avons lu n’est pas aussi clair en ce qui concerne cette
relation traditionnelle entre le temple et le roi.
Le V 5b pose bien le pb : « est-ce toi qui me bâtiras une maison pour que je m’y
installe ? » et le verset 11 y répond « c’est Le Seigneur qui bâtira une maison pour David » !
Ainsi le lien affirmé entre construction du temple et affermissement de la royauté que
nous avons vu précédemment dans les psaumes semble remise en cause : David n’a pas
mérité la promesse dynastique par la construction d’un temple.
Il y a dans ce texte toute une progression et un malentendu : David parle de construire
une maison au sens concret de bâtiment, « une maison de cèdre » quand le Seigneur, quant à
lui fait la promesse d’une « maison » tout court, au sens d’une dynastie, comme lorsqu’on dit
que la maison des Windsor est la famille des rois d’Angleterre. Toute la clé de ce texte réside
dans ce malentendu !
Là où l’un, David, s’inscrit dans l’espace, l’autre, Le Seigneur, s’inscrit dans le temps,
la durée des générations.
Et surtout, (v.7) le Seigneur souligne que cette promesse d’une dynastie, comme toutes
les autres faveurs faites à David, est un don qui n’est pas mérité, une grâce, et surtout pas par
la construction du temple. Le texte rappelle en quelque sorte à David qui est le patron, mais
aussi que le temple ne saurait être la demeure de Dieu, en tout cas sa demeure exclusive,
contrairement aux autres dieux du Proche Orient Ancien qui résident dans leurs sanctuaires
comme s’ils en étaient prisonniers au fond.
Le Dieu d’Israël est un Dieu itinérant, qui accompagne son peuple, le précède ou le suit
dans le désert, rappelons-nous l’arche.
C’est bien sûr l’événement historique de la destruction du Temple et l’exil de la maison
royale qui favorise le retour à cette conception d’un Dieu itinérant. Et lorsque le temple sera
définitivement détruit par les Romains en 70 ap. JC, c’est la Torah, la parole qui tiendra lieu de
lieu de résidence du Seigneur. Là où les temples étaient remplis d’inscriptions, d’écriture
(pensons aux hiéroglyphes égyptiens) ce sont les écritures qui deviennent temple1.
Alors cela Jésus l’avait déjà perçu et anticipé en quelque sorte, lorsqu’il déclare pouvoir
démolir et reconstruire le temple en trois jours. « C’est de son corps qu’il parlait » nous dit
l’Évangile de Jean. Ce corps qui, avec la résurrection passe du corps charnel au corps spirituel
pour paraphraser Paul, c’est-à-dire à la présence du Christ ressuscité au milieu de nous et en
nous.
Et c’est peut-être là le message-clé de ce texte pour nous aujourd’hui, pour notre foi :
il ne faut pas se laisser piéger par le malentendu entre David et le Seigneur : Là où nous
prétendons enfermer Dieu dans des lieux, le figer, le fixer dans un espace, Dieu lui-même
vient nous rappeler qu’il est mouvement, vie, dynamisme… Comme si Dieu était « au-dessus
de Dieu » pour reprendre la belle formule du théologien Paul Tillich2.

Alors F. & S. bien sûr les temples sont nécessaires : ils sont des repères dans notre
identité de croyants dans le parcours de nos vie jusqu’à notre mort et ils sont des supports
pour notre piété, mais le textes que nous avons médités et les paroles de Jésus nous
enseignent qu’ils sont loin d’être le « tout » de la présence de Dieu dans nos vies et nos cités.
Amen.

 

 

Annonces au culte du 26 novembre  2023 

 

 

 

 

Jeudi 23 ont eu lieu les obsèques de Mme Suzanne Pujol, âgée de 97 ans, à la chambre
funéraire de l’EHPAD rue Meyer.

 

 

Mardi 28 Novembre : Agapé Animation : « Un parcours dans la vie de nos ancêtres »
par Gisèle Camp.

 

Jeudi 30 Novembre: A 15 h : culte au Refuge.
                                            A 20 h 30 au Temple du Pont de l’Arn, concert classique avec Anne Alquier, soprano, Lise Lienhard, pianiste et Caroline Menrath, violoncelliste organisée

par l’Association de Françoise Dax-Boyer « Respirer en Montagne Noire » Participation libre.

 

Vendredi 1 er Décembre : A 20 h 30 au cinéma de Réalmont, rue Foulquier, dans le cadre
du Festival Migrant’scène, la CIMADE Tarn propose un film « Les engagés » d’Emilie
Frèche, suivi d’un débat animé par la Cimade avec la participation de son Président
national Henri Masson.

 

Samedi 2 Novembre à partir de 14 h 30 et dimanche 3 toute la journée : Vente annuelle
du Refuge Protestant à Castres, au 44 av. de Lautrec

 

Dimanche 3 Décembre : pour notre Paroisse, journée d’hiver à la salle municipale le
Thirondel à St Baudille.
Ouverture des stands à 9 h 30, culte à 10 h 30 avec la participation des enfants et de la
chorale, suivi de l’apéritif et du repas (inscriptions souhaitées pour une meilleure
organisation ; merci de porter vos couverts : assiettes, verres, couverts)
Le repas sera suivi du loto et de la tombola.

 

Information sur Ferrières : jusqu’au 15 Décembre, ouverture de la boutique de Noël au
Musée de Ferrières.
Du mardi au dimanche, de 14 h à 17 h, le musée est ouvert et propose un grand choix de
livres pour les enfants et les plus grands, des jeux, des objets de décoration, des produits
de l’artisanal local et du commerce équitable.

 

 

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